[47] été 2023
 
Journal d’été
[47] pages 4-5
Jacqueline Heinen, Daniel de Roulet, Jérôme Stettler
Istanbul allers-retours
[47] pages 6-13

La République de Turquie, qui célèbre son centenaire en octobre, a traversé une décennie marquée par une forte dégradation démocratique, par la violence de la répression et par un retranchement nationaliste et conservateur. Les élections des 14 et 28 mai 2023 n’ont pas stoppé cet enchaînement. Peuplée comme deux fois la Suisse et s’étendant sur plus de 100 kilomètres d’ouest en est, la mégapole d’Istanbul est un objet de recherche et d’exploration inépuisable. Clément Girardot et Nicolas Brodard y résident sur de longues périodes entre 2007 et 2013, puis plus sporadiquement. Ils y débutent leur carrière, respectivement dans le journalisme et la photographie, et se rencontrent pour la première fois en février 2011 au café de l’Institut français. Au moment où ils débarquaient à Istanbul, l’atmosphère était résolument optimiste et la scène culturelle stambouliote rayonnait. Leurs récits croisés, entre souvenirs professionnels et considérations personnelles, parlent d’exaltation et de mélancolie, de passion et de désillusion, de solitude et de fraternité.
Nicolas Brodard, Clément Girardot
 
Fragments d’une montagne
[47] page 15

«Elles sont où ces Alpes? On y va comment?», me demande Patricia, consultante sino-américaine qui vient pour la première fois en Europe, et à qui des amis ont chaudement recommandé une telle visite. La question formulée ainsi laisse croire qu’il s’agit d’un lieu précis, d’un espace bien délimité et accessible rapidement depuis Genève. Confusion du territoire entier et du lieu. Méconnaissance de cette sorte de muraille, ossature du continent européen, château d’eau de l’Europe, qui s’étale sur plus de 1000 kilomètres du sud-est de la France au nord de la Suisse, en passant par le sud de l’Allemagne, l’Autriche, la Slovénie, et la frontière nord de l’Italie. (…)

> Fragments d’une montagne (Le Pommier)
Nicolas Nova
«J’ai pu sortir de cet enfer grâce aux poètes»
[47] pages 16-21

Avec Gomorra, Roberto Saviano a fait connaître Scampia, dans la banlieue nord de Naples, bien au-delà des frontières. Lui-même éducateur et photographe, Olivier Pellegrino s’est vu ouvrir les portes du quartier par l’éducateur social, photo­graphe et écrivain Davide Cerullo, ancien enfant terrible des Vele. Rencontre.
Olivier Pellegrino
 
La fermeture éclair entre le jour et la nuit
[47] page 23

Tu es avec ta fille dans l’avion qui vous emmène dans ton pays de là-bas, elle a sa place à la fenêtre, tu es au milieu de la rangée de trois sièges, il n’y a pas de passager à ta droite. Vous venez d’attacher vos ceintures de sécurité, dans les haut-parleurs de la cabine une voix de femme vous annonce que le pilote va commencer la descente vers l’aéroport de votre destination. (…)
Marius Daniel Popescu
Dans les choux
[47] pages 23-31

> Dans les choux (Éditions du goudron et des plumes)
Audrey Peli
 
Conférence
[47] pages 24-26

J’allais donner ma première conférence. J’étais dans les toilettes au sous-sol d’un café, essayant de tester ma diction que je jugeais altérée à cause des deux bières que je n’avais pu m’empêcher de boire, espérant calmer cette peur qui me prenait désormais lorsque je me trouvais en public.
Pascal Berney
 
Koulounisation
[47] pages 27-28

Donc la colonisation. Le mot colonisation. Le fait de coloniser. M’intéressant particulièrement à la colonisation française en Algérie, je me suis demandé comment on disait «colonisation» en arabe. (…)
Salim Djaferi
 
Sur la trace de mots vagabonds
[47] pages 29-30

Si à Lisbonne il vous vient l’envie d’une orangeade, vous devrez commander une la­ranjada. À Athènes, ce sera une portokalada. Curieuse inversion : le mot grec pour orange rappelle le nom du Portugal, alors que le mot portugais, lui, vient de l’Orient lointain. Et la Grèce est en bonne compagnie: à quel­ques lettres près, elle partage son portokali avec les Roumains, les Turcs, les Arabes et même les Persans. Pourquoi? (…)

> Sur la trace de mots vagabonds (Infolio)
Alain Pichard
Topographies de la fragilité
[47] pages 32-33

Ingrid Weyland a parcouru de vastes paysages, de l’extrême sud argentin au Groenland, à la recherche de connexions intimes avec une nature isolée. En quelques années, en revenant plusieurs fois dans les mêmes paysages islandais, elle a constaté les dégradations dues au manque de respect des humains envers ces territoires. Et réalisé que rendre compte de la beauté de ces lieux dans ses photographies ne suffisait pas à inciter à leur protection. C’est ainsi qu’elle a imaginé d’imposer à ces images un froissement qui met clairement en évidence la violence des dégâts subis. «On dit qu’une feuille de papier froissé ne peut jamais retrouver sa forme originale: la trace persiste. De la même manière, la nature envahie avec irrespect est irrémédiablement endommagée et souvent irrécupérable.» (…)
Ingrid Weyland
Les silences habités du Grand Nord
[47] pages 34-35

Aux confins de la Norvège, dans la péninsule de Varanger ouverte sur la mer de Barents, est niché le village de Båtsfjord. C’est de la mémoire de ce pays que Cato Lein fait émerger de profonds visages et paysages en noirs et blancs. Ses photographies distillent un stupéfiant silence, une étrangeté sereine.
Jean Perret
 
Les dames de Locarno
[47] pages 37-40

lbva, pour La Boite Visual Art. Pour évoquer Patricia Boillat et Elena Gugliuzza, plutôt que le sigle de leur entreprise, nous avions pris l’habitude de parler des dames de Locarno. Depuis plus de deux ans, Jean-Pierre Greff, directeur de la Fondation Plaza, nous vantait les qualités de ces expertes recrutées pour accompagner la renaissance du cinéma de Marc J. Saugey. En mai, c’est donc dans leur ville si cinéphile qu’elles nous ont parlé d’elles et de leur travail. Que ce soit au Plaza ou au Capitole lausannois à leur réouverture, que ce soit sur la Piazza Grande ou dans n’importe quelle salle de cinéma de la planète, impossible de s’asseoir innocemment dans une salle de cinéma après les avoir rencontrées.
Élisabeth Chardon
Captage du 27 septembre 2021
[47] pages 40-41

Les volutes sont une représentation des énergies qui circulent dans le bâtiment du Plaza depuis le lancement du concours d’architecture. Posées sur les vitres, elles disent les fluidités, les rencontres, réelles ou peut-être fictionnelles. Elles donnent à deviner l’intérieur tout en projetant le reflet des passantes et des passants. Entre les réalités de la ville et celles du bâtiment se faufilent les citations de cinéastes que la Fondation Plaza a sélectionnées.
 Enen Studio
 
Chronique
Jean-Louis Boissier, Yann Courtiau
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